Société d'Agriculture Sciences et Arts de la Sarthe

Société d'Agriculture Sciences et Arts de la Sarthe

Coups de coeur de nos lecteurs

Ouvrir un livre est toujours le début d'une aventure.

Certains de nos lecteurs éprouvent un véritable "coup de cœur" pour l'un des ouvrages de la bibliothèque de la Société et désirent le partager.

Cet espace leur est réservé. 

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Joseph Guilleux a réuni les éphémérides sarthoises et mancelles extraites des bulletins mensuels de Sciences et Arts :

dans ces 91 pages classées chronologiquement, de l'an 586 à nos jours, vous trouverez les événements marquants de la vie de notre ville et de notre département.

Pour les consulter, en faire la demande au bibliothécaire (Nous rejoindre).

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Gnomonices Libro octo in quibus, par Paul Deciron

 

 

 

         Parmi les livres de notre bibliothèque, regroupés dans la section Astronomie-Gnomonique, j’ai isolé l’ouvrage de Christophoro Clavio Bambergensi daté de 1581. Bien que ce domaine particulier de l’Astronomie ne soit plus toujours dans l’air du temps, il m’est apparu intéressant d’évoquer la présence du Libro Octo dans cette rubrique de Sciences et Arts.

 

         Son auteur : Clavius Bambergensis (1538-1612) Père jésuite Clavius, professeur de mathématiques au collège des Jésuites de Rome, est la figure-clé du début de la tradition scientifique de la Compagnie de Saint Ignace. Toujours considéré, comme son initiateur, particulièrement en mathématique et en gnomonique, il fut à l’origine de l’enseignement de cette science, dispensée dans les collèges des Jésuites à la fin du XVIe siècle.

 

 

 
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         Parmi la cinquantaine de livres anciens compulsés durant ces quarante ans de " voyages " gnomoniques, depuis la médiathèque du Mans (très bien pourvue en ouvrages sur cette science) à celle de Poitiers ou encore évidemment en notre propre Société, je pense que cette édition remarquable de 655 pages du XVIe restera le modèle le plus complet et le plus précis de cette période.  

 

    Nous sommes en 1581, Clavius reste fidèle à la réalité physique des sphères célestes autour de la Terre qui occupe le centre de l’univers, conformément à la physique d’Aristote et à l’interprétation de la Bible.

 

   Mais Clavius est un mathématicien, c’est un professeur, le plan de ses démonstrations est solidement établi ! Il esquisse une méthodologie précise qui sera employée par les auteurs des XVIIe, XVIIIe siècles.

 

    Son plan général s’établissant par grands paragraphes, précis, rigoureux mêlant les mathématiques, la trigonométrie et la géométrie.

 

Une division en Liber : Primus (page 1) présentation de tous les  types de cadrans, Liber Secondus (page 2) horloge horizontale,  Liber Tertius (page 293), […] jusqu’au Liber Octavus (page 634) avec le cadran en forme de cylindre (montre de berger)

 

 

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Horloge du voyageur, ou Montre de berger

 

 

Dans chaque Liber sont exposés :

 

 A) le problème, avec sa description  

 

 B) la proposition avec son argumentation. C’est ainsi que les différentes heures solaires seront traitées.

 

  Exemple : au problème 10, le cadran aux heures dites Italiques, la proposition 10 expliquera le raisonnement avec le dessin correspondant.

 

 

 

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Heures Italiques page 193

 

 

    Chacun comprendra que la lecture de ce genre « d’examen » demande de l’entraînement et du calme avant de « partir dans les étoiles » ! Mais posons-nous la question en pensant à Saint-Augustin : Qu’est-ce donc que le Temps ?...

 

    Dom Bedos de Celles pensait-il à cet ouvrage quand il écrivait en 1780 : On me permettra de dire que leurs Traités, que j’admire plus que perfonne & qui méritent les plus grands éloges, ne font qu’à la portée que des Savans, de ceux qui pour l’ordinaire n’en font prefque aucun ufage dans la pratique & qu’ils ne peuvent être d’aucun fecours à ceux qui n’étant pas Mathématiciens, font comme en poffeffion de faire tous ces cadrans  que l’on rencontre partout en fi grand nombre. Faut-il donc s’étonner qu’ils foient mauvais pour la plupart puifque leurs auteurs ne pouvant atteindre à la théorie de ces grands hommes, n’en fauraient en appliquer les principes à leurs opérations ?

 

 (C’est la pratique que j’ai adoptée)

 

   Clavius présageait déjà que les progrès de la science allaient de « connivence » avec les mathématiques et l’étude des phénomènes naturels. Petit à petit il reconnaîtra l’œuvre de Copernic, en évoquant les découvertes de Galilée, ajoutant même « qu’une réforme des orbites célestes devenait indispensable ».

      "Gnomonices libro octo in quibus" est consultable sous la cote 1295

 

Analyse du livre Traité d’astronomie d’Isaac Hugues (Saumur)

Imprimé par Pierre Girard & Jean Birotteau, Imprimeurs & Libraires, 1655 

 

                    

À la suite de l’exposition à la Médiathèque Louis Aragon présentée par M. Thomas Guillemin, je me suis interrogé sur l’évolution qui aurait pu intervenir entre le livre du Jésuite Clavius (1581) et celui du Protestant Isaac Hugues (1655). Et ceci particulièrement dans le domaine de l’Astronomie. En rappelant que Clavius, après l’avoir condamnée reconnaîtra petit-à-petit l’œuvre de Copernic. Envisageant même, dans son édition de 1611, qu’une réforme des orbites célestes devenait indispensable !

 

À la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe l’héliocentrisme s’opposa au géocentrisme. Il fut l’objet d’interdits religieux, Luther également condamna Copernic et l’Inquisition romaine s’employa à faire disparaître le système copernicien. Si l’on doit à Galilée les observations astronomiques et les premiers principes mécaniques justifiant l'héliocentrisme. Galilée fut condamné à se rétracter en 1633 pour son livre Dialogue sur les deux grands systèmes du monde. Les interdits furent levés en 1741 et 1757 par Benoît XIV.

Ce qui n’empêche pas Isaac Hugues en 1665 d’exposer dans ses pages 2 et 3 du Traitté d’Astronomie : « 1- Le globe de la terre est immobile. 2- La terre et l’eau ne font qu’un seul globe. 3- Ce globe est le centre du Monde ».

Force est de constater que, malgré les doutes de plus en plus évidents des astronomes, le protestantisme ne voulut pas enfreindre le catholicisme dans son attitude dogmatique.

Paul Deciron

 

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Les Affiches du Maine, par Isabelle de Goyon

 

    Qui n'a pas rêvé de pouvoir découvrir les ouvrages d'une bibliothèque ancienne comme celle de notre Société ?

    La lecture d'un certain nombre de publications m'apportait une vraie jubilation. Je ne me lassais jamais, par exemple, des recueils de journaux de la Sarthe parus depuis 1777 jusqu'au XIXe siècle sous le titre de Annonces, Affiches et Avis divers.

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    Grâce à eux, j'entrais dans la vie des Sarthois du XVIIIe siècle, je pouvais mieux comprendre leurs réactions, éprouver de l'empathie à leur endroit. Connaître au jour le jour les lois, édits royaux et mesures générales auxquels chacun doit se soumettre, jusqu'aux détails de la vie courante, quel bonheur !

    Côtoyer les faits divers, les découvertes scientifiques, les spectacles et publications littéraires, mais également les avis commerciaux, les us, appels à la sagesse, informations médicales (fréquemment même des publicités insérées par les praticiens itinérants, chirurgiens, dentistes...), et même les meilleures recettes de cuisine, les recommandations en matière d'hygiène (on peut louer une baignoire taille adulte ou enfant !)... me permettait d'ouvrir une porte dans le monde des Lumières.

     On apprend des détails du quotidien, par exemple que les vêtements d'occasion sont acquis par toutes les classes de la société et que les arrivages de Paris sont très attendus par les élégants.

 

 

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     L'imprimeur de ces journaux, Monnoyer au Mans, gère les petites annonces : co-voiturage, objets perdus et trouvés, livraisons de denrées alimentaires plus ou moins rares comme citrons, épices et autres spécialités étrangères... Bien entendu, chacun peut s'abonner aux divers journaux nationaux et régionaux en ses bureaux. (Actuel Espace Plantagenêt au Mans).

     Si le XVIIIe siècle fascine, la lecture de ces journaux me passionnait au point de partir à la recherche d'archives et d'écrire un livre sur la vie quotidienne des Sarthois durant ce siècle.

 

"Annonces, Affiches et avis divers du Maine " est consultable sous la cote 0929.

 

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Les commentaires de Guy Jouenneaux sur les Comédies de Térence, par Martine Barilly-Leguy

 

      Rare, précieux, magnifique... tel est l'ouvrage que je tiens à vous présenter.

Bien connu des bibliophiles avertis sous la formule du "Térence de Trechsel", cet incunable de l'édition lyonnaise date de 1493.

     Joyau de la bibliothèque de la Société, il comporte un ex-libris de la plume du jurisconsulte Julien Bodreau dont le portrait, daté de 1637, est suspendu dans la salle de réunion. Son arrière petit-fils, Mathieu-Guy Chesneau-Desportes, légua ce tableau à la Société alors qu'il en était président au début du XIXe siècle, mais la date exacte de l'entrée à la bibliothèque de l'incunable possédé par son ancêtre reste inconnue.

     Gros in 4° relié en veau, il comporte 630 pages en pur chiffon de lin au filigrane bien visible montrant un serpent avec de nombreux traits transversaux, motif répertorié dans le catalogue de Briquet et provenant d'un moulin à papier de Montbrison. Mais ce sont surtout les 157 bois gravés de ce livre qui m'ont conquise.

     En l'absence de didascalie, illustrer le texte d'une pièce de théâtre est indispensable à la compréhension de sa lecture. Or, si les manuscrits médiévaux sont illustrés, les premières éditions imprimées ne le sont pas se heurtant à un problème tant technique qu'économique qui sera résolu à partir de 1460 en France. Le nom du dessinateur-graveur des bois de notre volume demeure ignoré et, si quelques historiens se sont intéressé à la gravure des incunables, à ma connaissance, aucune analyse iconographique n'a, à ce jour, été publiée pour l'ensemble de ce corpus. C'est donc d'un œil candide que j'ai regardé ces images.

 

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     Dès la page de titre, le livre est illustré d'un bois gravé montrant Guy Jouenneaux devant son pupitre. Originaire du Maine, bénédictin réformé de Chézal-Benoît, il enseigne la grammaire à Paris où Germain de Ganay l'introduit dans les cercles humanistes. Ses gloses sur les Comédies de Térence sortent en 1492 des presses de l'imprimeur parisien de Marnef. L'année suivante, à Lyon, le Mayençais Johann Trechsel, ouvert aux influences italiennes, s'attachant le savoir-faire de Josse Bade, les publie en les illustrant de 160 bois gravés. L'ouvrage de 638 pages paraît le 29 août 1493. L'incunable de la Société est donc amputé d'un demi-cahier de 8 pages orné de 3 bois gravés que j'ai pu retrouver dans l'exemplaire de la BnF.

     

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     À la surface double du livre ouvert, le commentaire de Guy Jouenneaux, augmenté des annotations de Josse Bade Ascensius, est imprimé en longues lignes à caractères romains et embrasse le texte de Térence inséré dans une vignette. Une pleine page est consacrée au théâtre de facture Renaissance qui reprend les composantes de la scène antique. Theatrum, proscenium avec les portes du décor, prostituées, édiles autorisant la représentation, joueur de flûte donnant le ton comique ou dramatique, spectateurs si bien croqués : rien ne manque.

 

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     Les autres bois gravés, qui illustrent les scènes des six comédies, n'occupent qu'une demie page. Ils affichent un décor nouveau à chaque pièce qu'une figure de Calliopius vient clore. Les images définissant deux scènes différentes successives se lisent de droite à gauche. Le souci du détail, la finesse du trait soulignant les ombres, la justesse de l'évocation du jeu des personnages dont on perçoit le mouvement, l'expression des visages donnant à entendre le dialogue, révèlent l'immense talent de l'auteur de ces bois gravés. Vêtus à la mode Renaissance, et non à l'antique, les comédiens portent des hauts de chausse, des vestes aux manches gigot ornées de crevés, des robes au beau drapé décorées de pierreries, des coiffures soignées... La beauté et l'exactitude de ces visages n'effacent cependant pas la maladresse du dessin des pieds. Resté anonyme, l'artiste pourrait être le "Maître au pied bot " reconnu par Félix Devernay et Anatole Claudin. La comparaison avec les dessins de Dürer pour l'imprimeur Amerbach, avec les bois gravés des éditions de Grüninger et de Vérard, permet d'affirmer la supériorité des illustrations de Trechsel.

      Si ces bois gravés font bien de l'incunable de Guy Jouenneaux "le plus beau des livres illustrés lyonnais" ainsi que l'écrit André Martin, ils sont pour moi une source intarissable d'admiration du savoir-faire et du talent des humanistes de la Renaissance.

 

"Guidonis Juvenalis natione Cenomani in Terentium familiarissimo interprætatio cum figuris unicuique scænæ prœpositis" est consultable sous la cote 890

 

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23/01/2022
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