Société d'Agriculture Sciences et Arts de la Sarthe

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38 - Louis-Gaspard-Joseph de Clermont Gallerande

Louis-Gaspard-Joseph de Clermont-Gallerande

1819

par Benoît Hubert

 

 

     Louis-Gaspard-Joseph était le fils naturel de Pierre-Gaspard de Clermont-Gallerande, lieutenant-général des armées du roi et d’Anne-Elisabeth-Jeanne Wiestin, fille d’un riche marchand de Deggendorf en Basse-Bavière. L’enfance du jeune Clermont-Gallerande se passe entre le château de Gallerande à Pringé [aujourd’hui commune de Luché-Pringé] et la pension du collège des jésuites de La Flèche jusqu’à leur expulsion en avril 1762, puis à l’école militaire qui lui succède. Envoyé à l’école d’équitation d’Angers en décembre 1766, il intègre ensuite comme volontaire le régiment d’Orléans-cavalerie (en juin 1767), commandé par son cousin-germain Charles-Georges de Clermont, marquis de Gallerande, où il va diriger la musique. Il épouse Elisabeth-Hyancinthe  Lorfèbvre, une riche héritière, à Lille le 3 mai 1785.

 

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     Fatigué de la contraignante vie de garnison, il quitte le service en 1787 et regagne la Piltière à Mareil-sur-Loir, que son père lui avait légué en héritage. Il reçoit la croix de Saint-Louis le 28 janvier 1792, huit mois avant la suppression de cette décoration.

      A la Révolution, après avoir démissionné  de la mairie de Mareil en novembre 1791, il quitte le pays fléchois en février de la même année pour séjourner à Lille puis au Mans en 1795. Adversaire du régime impérial, il y fait pourtant intégrer ses deux fils dans des régiments de cavalerie. La Restauration permet à lui-même et sa famille de retrouver places et honneurs. En 1815, il est nommé colonel de la garde nationale de la Sarthe ; il est décoré de l’ordre du lys et de la Légion d’Honneur. Il reste dans la capitale cénomane jusqu’en avril 1821 et y occupe les fonctions de maire adjoint et de président de la société royale des arts et des sciences.

     Il décide ensuite de suivre ses fils en garnison à Versailles et d’assurer la gestion et la promotion de leurs carrières, d’autant que son vieux compagnon d’armes le marquis de Latour-Maubourg est devenu ministre de la guerre depuis la fin de 1819.    

     La déchéance de Charles X et l’arrivée sur le trône de Louis-Philippe en juillet 1830 conduit ses deux fils à refuser de jurer fidélité au nouveau régime et à démissionner de l’armée. Cette « deuxième Révolution » provoque le retour de toute la famille à La Piltière à Mareil-sur-Loir.

 

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Il y meurt nonagénaire en 1837.

     

« L’homme qui ne voulait pas être président »

     Il laisse une œuvre considérable, jusqu’ici largement méconnue. Historien de sa famille, il se montre aussi un grand collectionneur de manuscrits, bibliophile, « antiquaire » et érudit renommé, collectionneur de monnaies anciennes et de médailles, de tableaux, de poteries de Bernard Palissy etc. Ses talents étaient multiples : peinture, poésie et surtout musique dont il nous laisse de nombreuses compositions tant religieuses que profanes.  

     Le chevalier de Clermont-Gallerande laisse une œuvre manuscrite d’une soixantaine de volumes d’environ 300 pages chacun dont la plus grande partie est conservée au fonds ancien de la médiathèque au Mans. Il avait été reçu membre de l’Académie d’Angers, comme « associé étranger », en 1780 et y avait produit plusieurs travaux remarqués (restés sous forme manuscrite) sur le roi René et les grands hommes de la province d’Anjou. Il avait été aussi membre de l’Académie celtique en 1805.

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     Ces nombreux volumes manuscrits relatent plusieurs moments de sa vie de sociétaire, en particulier la séance qui le vit accéder à la présidence :

« Le mardi 22 juin 1819 à six heures du soir, la société royale des arts s’assembla dans sa salle à la municipalité pour y vaquer à la nomination du bureau sous la présidence de Mr Dodun ex-ingénieur des Ponts et chaussées. On procéda par voie du scrutin à la nomination d’un nouveau président annuel et après trois différents scrutins, la majorité se réunit en faveur de Mr de Clermont qui fut forcé d’accepter bien contre son envie. La sous-présidence étant dévolue à Mr Dodun, ex-président ».

 

Discours que Mr de Clermont prononça à la séance de la société royale des arts le 26 juillet 1819 comme président de la dite société, ayant été élu à cette place le 22 juin précédent

 

« J’ai l’honneur, Messieurs, de débuter aujourd’hui comme président d’une société estimable, estimée et éclairée, laquelle par ses travaux tendant à l’amélioration et au bien général est devenue par ses lumières, celle du département.

Je sens, Messieurs, toute mon insuffisance pour remplir ce poste honorable, et pour remplacer mon prédécesseur, qui sait unir aux talents, au mérite personnel, l’envie de propager ses connaissances et rendre utiles ses découvertes.

Longtemps il a mérité dans la carrière honorable qu’il a parcourue les suffrages de ses chefs et du gouvernement : aujourd’hui, il consacre ses talents à éclairer ses concitoyens par ses recherches et par des travaux utiles à son pays.

Il serait difficile à moi de rivaliser avec lui de mérite et de connaissances ; mais la bonne volonté, le désir de capter vos suffrages, votre estime et l’envie de ne pas me rendre indigne de la place dont votre indulgence a daigné m’honorer, viendront à mon aide et avec de grands efforts, il est permis d’oser espérer.

Toutes les connaissances sont du ressort de notre société, agriculture, filature, industrie, architecture, médecine, antiquité, poésie etc. Non seulement les ouvrages de nos estimables confrères tendent à éclairer l’esprit, mais même à diriger le cœur.

Les connaissances qui font l’objet de l’esprit humain, sont d’une trop vaste étendue, et la vie de l’homme est trop courte, pour qu’elles puissent être embrassées par un seul. Aussi notre société se fait-elle un devoir de partager ses travaux et chacun de nous adopte la partie qui lui convient. Depuis que j’ai l’avantage d’être membre de la société des arts, j’ai entendu ces différentes parties traitées dans notre enceinte et en séances publiques avec cette érudition et ces connaissances qui dénotent le génie et les talents, et qui concourent à la gloire et à la célébrité de cet utile établissement.

Heureux, Messieurs, si les faibles notions que j’ai acquises par mon assiduité au travail, peuvent justifier votre choix, et m’acquitter auprès de vous de l’honneur que vous avez daigné m’accorder en m’élevant à la place honorable de votre président, que je ne représenterai qu’en tremblant, et où je gagnerai infiniment en vous écoutant et en cherchant à me modeler sur mes honorables confrères ».

     Plusieurs de ses discours sont conservés dans ses papiers personnels. Il  prononce le 14 décembre 1820 un long discours très érudit sur « les gymnases ou exercices gymnastiques », et une  « dissertation sur les pantomimes », d’après l’académicien Burette. Il est remplacé à la présidence de la société à la fin de l’année 1820 par l’ancien manufacturier et talentueux littérateur Desportes de Gagnemont.

 

Renouvellement du président de la société royale des arts de la ville du Mans ; conformément au règlement de la dite société, approuvé par son excellence le ministre de l’intérieur

 

« Louis-Gaspard-Joseph de Clermont, membre de la société royale des arts, ayant été élu président de la dite société le 22 juin 1819 présidence qui, selon le règlement ne doit durer qu’un an sans pouvoir être réélu, elle fut prolongée par les circonstances jusqu’à la séance du mardi 26 décembre 1820 dans laquelle on procéda par voie de scrutin à la nomination d’un président, d’un vice-président, d’un secrétaire, d’un trésorier et d’un archiviste à la pluralité des voix Mr Desportes de Gagnemont fut élu président, M. de Clermont vice-président, Mr Houdbert secrétaire, Mr Bérard trésorier et Mr Le Dru archiviste. 

Nota : la société libre des arts du Mans qui avait succédé à la société d’agriculture de cette ville qui existait avant la Révolution, obtint de la sanction du ministre de l’intérieur de se donner un règlement en mars 1799 et adopta le titre de société libre des arts, titre que Sa Majesté Louis XVIII par son ordonnance du mois de décembre 1814 a bien voulu changer en celui de société royale des arts ».



18/10/2016
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